Les indigènes dans nos jardins
Cette année, Montréal est devenue la première ville canadienne à être reconnue comme une « Ville amie du monarque » au niveau OR[1]. D’ailleurs les deux principales espèces d’asclépiades nécessaires (Asclepias syriaca, Asclepias incarnata) à la reproduction et à la survie du monarque[2] apparaissent de plus en plus souvent dans les plates-bandes résidentielles et municipales. Pourtant, il n’y a pas que le monarque qui dépend de plantes indigènes. Une foule d’autres insectes, d’oiseaux et d’animaux de notre patrimoine naturel dépendent directement de plantes indigènes qu’ils connaissent bien, et qui ont du mal parfois à se faire une place dans nos jardins.
On hésite à les intégrer pour toutes sortes de raisons. On les assimile souvent à des mauvaises herbes ou on les croit dangereuses. Pourtant, plusieurs indigènes sont loin d’avoir l’air de mauvaises herbes! Et les plantes dangereuses (Berce du Caucase) auxquelles vous pensez en ce moment sont en fait des plantes exotiques introduites au XIXe siècle[3]. En réalité les plantes et arbustes indigènes peuvent être nos alliés dans les situations les plus difficiles, comme dans les plus faciles. Dans les zones d’ombre par exemple, où en raison de la compétition racinaire, il est difficile de créer des plates-bandes bien fournies et fleuries, les indigènes sont idéales pour recréer les écosystèmes de nos sous-bois qui sont connus pour leur grande beauté. Quelques trilles, quelques fougères – et pas que la fougère à l’autruche! –, les sanguinaires et plusieurs autres colonisent ces espaces et peuvent les rendre intéressants toute la saison! D’autres espèces qui aiment le soleil peuvent servir à recréer des prés fleuris évoquant ceux qui longent les berges du St-Laurent et qui nous font rêver! Vous pouvez aussi intégrer sans craintes plusieurs d’entre elles dans vos arrangements. En les plaçant au bon endroit, vous n’aurez presque plus à vous en occuper – elles seront chez elles! Il y a des indigènes pour tous les goûts : des plantes d’ombre, des graminées, des fleurs de toutes les tailles, mais aussi des arbres, et toute une série d’arbustes très rustiques pour toutes les expositions.
En les découvrant et en en plantant une certaine proportion dans vos jardins, vous aurez adopté des plantes fascinantes et adaptables, tout en soutenant la diversité de notre patrimoine naturel. D’ailleurs saviez-vous que la majorité des vivaces indigènes que vous trouvez chez nous sont en situation précaire dans nos environnements naturels? Les trilles (Trilium grandiflorum) par exemple sont en danger parce qu’ils sont si beaux qu’ils se font cueillir alors que leur cycle de reproduction est trop lent pour soutenir la pression. La carmantine d’Amérique (Justicia americana), originaire de la région de Montréal, et une plante de notre section aquatique, est en perte importante d’habitat. En les plantant, non seulement vous ajoutez des beautés fascinantes dans vos jardins, vous aider directement à les protéger!
Pascale Duhamel
1]Voir https://fr.davidsuzuki.org/passez-a-laction/agissez-localement/effet-papillon/ville-amie-des-monarques/
[2]Voir https://monarque-espacepourlavie.ca/?gclid=Cj0KCQjwgLLoBRDyARIsACRAZe7pjk-JNhrG72IkW4uEPwZJtJ04gBjoHzNMY_5FR2P5D4vO6tEIoO0aAs_2EALw_wcB
[3]Claude Lavoie, 50 plantes envahissantes. Protéger la nature et l’agriculture, Québec : Les Publications du Québec, 2019.